La terreur du virus ! LâHomme se croit-il donc immortel ? Il fait passer sa santĂ© avant la vie. La vie, le sens de la vie, ça nâa rien Ă voir avec la longĂ©vitĂ© ! Passer plus de temps sur Terre, bloquĂ© dans un appartâ en tĂ©lĂ©travail ! Tout est fait dans notre sociĂ©tĂ© pour faire vivre les gens dans la peur. Pourtant, il convient de ne pas avoir peur dans la vie pour ne pas avoir peur dans la mort.
Au milieu de cette rĂ©pression montante, je vais vous parler paisiblement de fin de vie, simplement de la fin naturelle du corps. Je vous propose un texte, issus de mots que jâai amorcĂ©s avec ma mĂšre Ă deux ans de sa mort (elle avait 80 ans, rien d’imprĂ©visible). Pour rĂ©pondre Ă sa question âJe suis foutue ?â jâai prĂ©fĂ©rĂ© poser la situation sous un autre angle, lâamener Ă se prĂ©parer paisiblement au passage. Elle avait eu un soupir de relĂąchement, un sourire bien plus agrĂ©able que la panique de la question.
âTon Ăąme est puissante, elle doit garder la volontĂ© de partir quand il sera temps”.
A quelques semaines de sa mort, son Ăąme n’avait plus le dessus sur le mĂ©dical. Et je me dĂ©solais de la voir accrochĂ©e Ă la vie, comme un oiseau dans des barbelĂ©s. Souvent, je lui disais â tu sais, tu peux partirâ.
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“Maman, tu peux partir maintenant.
Ton enveloppe est fatiguĂ©e, usĂ©e par tant de vie. Il faut libĂ©rer ton Ăąme de cette enveloppe qui a fini son temps. Tu vas prendre une autre forme, quitter la chair quâon tâa prĂȘtĂ©e un temps..
Je sais que tu mâentends.
Alors ce corps, il faut le laisser glisser, il est au bout de ce quâil pouvait donner.
Il se satisfait des petites gouttes de sucre pour te garder les yeux ouverts, trop ouverts parfois, comme hallucinĂ©, je ne sais pas sâils font encore leur travail. mais tu sens tout ton corps repose sur ses cousins, bien calĂ©s, sans efforts, sans mouvement. On te soulĂšve, avec prĂ©cautions, une jambe pour la laver, raide avec les pieds tendus en pointe, tes orteils quâon a du mal Ă assouplir. Un corps qui fut joli Ă tous les Ăąges, mĂȘme maintenant patinĂ© par les annĂ©es, il voudrait se reposer, se ramollir.
Il le fera quand tu lâauras quittĂ© ; il attend paisiblement que ce moment arrive.
Souviens toi comme tu as cru en autre chose que ce temps incarnée pour nos ùmes, tu vas rejoindre tes parents, tes amis.
On tâas prĂȘtĂ© ce corps agrĂ©able, avec des longs cheveux noirs et ces grands yeux bleus magnĂ©tiques, une belle silhouette de femme. Hmm, ça me fait sourire ; je repense Ă ces photos, avec tes sĆurs et nous, tes enfants.
Tu te souviens juste avant de naĂźtre ? Tu te souviens comme tu avais peur ?
Lâinconnu fait toujours peur et puis, une fois passĂ© cette naissance, tout a pris du sens
et lâavant tu lâas vite oubliĂ©.
Tu vois , il a trĂšs bien bossĂ© ce corps. Et lĂ , ça y est, il a fini son rĂŽle. On le maintient par ce tuyau qui lâalimente et lui fait gagner quelques jours, semaines, quelques mois que je n’espĂšre pas.
Est-ce une vie ?
Lâenveloppe te laisse pour la suite, elle va rester ici dĂšs que tu voudras redevenir esprit, une pure vapeur, une lumiĂšre. Lâenveloppe te laisse aller vers la suite de lâhistoire.
Nous sommes tous prĂȘts, nous attendons lâapaisement qui arrive. Tu peux respirer profondĂ©ment et lentement. Profiter de cet air qui nourri ton corps, quel mystĂšre cette machine de chair.
Câest le moment dâaller, plus loin. Tu nous raconteras, tu nous accompagneras dâune façon diffĂ©rente, bien plus forte, libĂ©rĂ©e, et posera sur nos lĂ©vres des sourires de souvenirs et dâĂ©changes.
La peur fugace de lâinconnu, du grand passage.
Tu te souviens, juste avant de naĂźtre, tu te souviens comme tu avais peur ?”
TL
Musiques :
Chicano Batman â Color my life
Kristel – Wait for Me
Björk â Violently Happy
Santi & Tugçe â Gelincik
Propollerhead – History Repeating
Sâil vous plaĂźt, rapprochez vous de vos anciens, parler leur avant de regretter, touchez les, touchez les trĂšs tĂŽt bien avant la maladie. Je crois, jâespĂšre que vous comprenez aujourdâhui, avec ces injonctions Ă restez loin les eux des autres, comme la distanciation ne fait pas partie de la vie.
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